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Temarama Anguna-Kamana, future représentante de la région Pacifique Sud-Ouest au Bureau de la CMP et promotrice de l’approche «Une seule santé» et du renforcement des capacités

Posted on ven, 13 Déc 2024, 12:20

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Temarama Anguna-Kamana lors de la dix-huitième session de la CMP © FAO

Ce mois-ci, nous nous entretenons avec Temarama Anguna-Kamana, cheffe du Ministère de l’agriculture des Îles Cook et future représentante de la région Pacifique Sud-Ouest au Bureau de la Commission des mesures phytosanitaires (CMP).

Bienvenue Temarama! Pour commencer, pourriez-vous nous parler de vous, de votre carrière et de quelques-uns des accomplissements que vous avez réalisés?

Merci de m’avoir invitée à participer à cet entretien! Je m’appelle Temarama Anguna-Kamana et je dirige depuis octobre 2018 le Ministère de l’agriculture des Îles Cook. Je suis fière d’être la première femme à accéder à cette responsabilité et de mettre à profit mon expérience en matière de ressources humaines et de gestion d’entreprise, qui est bien différente de l’expertise scientifique et agricole qui prévaut traditionnellement au sein du Ministère.

Auparavant, j’ai été pendant 12 ans responsable des ressources humaines au Ministère de la santé. Lorsque j’ai rejoint le Ministère de l’agriculture, j’ai fait de la valorisation du personnel et des ressources une priorité. Nous avons modernisé les installations, fourni au personnel de meilleurs outils et créé un environnement de travail plus favorable. Ces efforts ont été récompensés. En effet, depuis six ans, le Ministère reçoit régulièrement le Prix du secteur public pour l’excellence de la performance.

Vous venez du monde de l’entreprise et des ressources humaines. Qu’est-ce qui vous a incitée à travailler avec une équipe très technique comme celle de la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV)?

Ma collaboration avec la CIPV a débuté en 2019, lorsque le Ministre de l’agriculture et moi-même avons assisté à la quatorzième session de la CMP. C’était la première fois que je découvrais cette organisation mondiale et j’ai été fascinée par son travail. En 2022, j’ai assisté à la Conférence internationale sur la santé des végétaux à Londres et cela m’a ouvert les yeux sur le travail à effectuer dans notre région ainsi que sur l’importance de s’aligner sur les normes internationales pour les mesures phytosanitaires (NIMP) et sur les objectifs de la communauté de la CIPV en général. Je me suis rendu compte que nous devions agir davantage au niveau national, mais aussi régional, pour tirer le meilleur parti de notre collaboration avec la CIPV.

Lors de la CMP-18, vous avez été désignée pour devenir membre du Bureau de la CMP à partir de 2025, en tant que représentante de la région Pacifique Sud-Ouest. Qu’est-ce qui vous a motivée à présenter votre candidature?

Je me suis dit qu’il était temps pour le Pacifique de mieux faire entendre sa voix. Je pense que la présence d’un représentant de la région Pacifique à la table des négociations permet de faire entendre les défis et les points de vue propres à cette région. Par exemple, nous rencontrons des problèmes spécifiques liés à l’isolement géographique, à la limitation des ressources et aux changements climatiques, qui ne peuvent pas toujours être résolus avec une seule et même approche. En outre, le Directeur général de la FAO a exprimé son souhait de renforcer les relations avec le Pacifique. Par conséquent, le fait de représenter le Pacifique est à la fois l’occasion de contribuer à cet objectif et de plaider en faveur de notre région.

Le Directeur général de la FAO, M. QU Dongyu, s’est rendu aux Fidji en novembre dernier, où il a ouvert le Forum des solutions pour les petits États insulaires en développement 2024. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet et nous expliquer le lien avec votre action en faveur de la santé des végétaux?

Lors de la réunion aux Fidji, le Ministre de l’agriculture et moi-même avons eu une réunion bilatérale avec le Directeur général et la Directrice générale adjointe de la FAO. Cette réunion a été pour nous une importante occasion de faire connaître les besoins et les priorités de notre région. L’un des principaux points que j’ai soulevés est la nécessité pour le Pacifique de disposer d’un siège au Conseil de la FAO. Cela permettrait en effet de s’assurer que nos problèmes spécifiques sont présentés en haut lieu. J’ai également préconisé une augmentation des ressources fournies par la FAO à la CIPV car le travail de cette dernière est essentiel pour garantir la sécurité alimentaire et préserver la santé des végétaux dans le monde. Enfin, j’ai plaidé en faveur d’une distinction entre la santé des végétaux et la santé environnementale, en expliquant que si les initiatives de protection de l’environnement sont vitales, la santé des végétaux mérite qu’on lui consacre des initiatives spécifiques.

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Délégations des Îles Cook et de la FAO au Forum des solutions pour les petits États insulaires en développement 2024 © FAO

Le dernier point que vous avez soulevé est étroitement lié à l’approche «Une seule santé», une priorité essentielle pour préserver la santé des végétaux. Quel est, selon vous, le rôle de la santé des végétaux dans cette approche?

La santé des végétaux a un impact direct sur la sécurité alimentaire, la santé des sols et la nutrition, qui sont autant d’éléments fondamentaux pour la survie de l’humanité, mais elle est souvent éclipsée par la santé environnementale et animale. Les végétaux sont à la base de la sécurité alimentaire et contribuent à la santé humaine et animale. Je plaide depuis longtemps pour que la santé des végétaux soit dissociée de la santé environnementale et considérée comme une priorité à part entière, car si la santé environnementale se concentre sur les forêts et les zones humides, celles-ci ne concernent pas directement les aliments que nous consommons. Cette distinction permettrait d’accorder à la santé des végétaux l’attention qu’elle mérite et de faire en sorte qu’elle ne soit pas négligée lors de l’affectation des ressources et de l’établissement des priorités. Sans des végétaux et un sol sains, aucune agriculture n’est possible.

L’approche «Une seule santé» est une priorité essentielle que je souhaite défendre à la fois dans ma région et au niveau mondial. Dans la région Pacifique, je fais partie de plusieurs groupes de travail qui considèrent l’approche «Une seule santé» comme une priorité. Je préside le Réseau des directeurs des services vétérinaires et des productions animales du Pacifique (PHOVAPS) et je suis également membre du Réseau des directeurs des services agricoles et forestiers du Pacifique. En 2024, j’ai également assisté à une réunion sur l’environnement qui avait pour but d’élaborer le Plan d’action du Pacifique pour l’intégration de la biodiversité dans les différents secteurs agricoles, notamment l’agriculture, l’élevage, la sylviculture, la pêche et l’aquaculture, pour l’alimentation et l’agriculture (2024-2030), en prenant soin d’en aligner plus étroitement les domaines et priorités stratégiques sur l’approche «Une seule santé». Au niveau mondial, je me félicite de la création récente du Groupe de réflexion de la CMP sur la santé des végétaux dans le cadre de l’approche «Une seule santé». Afin de continuer à promouvoir cette approche, j’ai répondu à l’appel à experts pour rejoindre ce groupe de réflexion, car je considère que le travail qui doit être mené a une incidence directe sur les défis phytosanitaires auxquels nous sommes confrontés dans la région Pacifique.

Quels sont les principaux défis et priorités de la région Pacifique dans le domaine phytosanitaire?

L’un de nos principaux défis est la menace que constituent les organismes nuisibles d’apparition récente. Spodoptera frugiperda (la chenille légionnaire d’automne) et Oryctes rhinoceros (le rhinocéros du cocotier) sont les organismes nuisibles qui nous inquiètent le plus, car ils peuvent présenter des risques importants pour nos cultures vivrières. Heureusement, nous n’avons pas détecté d’incursions majeures récemment, à l’exception d’un foyer de mouches des fruits que nous avons réussi à éradiquer. Nous sommes un petit pays insulaire et nos ressources sont donc limitées. Nous surveillons chaque semaine l’éventuelle présence d’organismes nuisibles tels que l’escargot géant africain et d’autres espèces envahissantes. Nous menons également d’importants efforts de sensibilisation, en encourageant les visiteurs et les importateurs présents sur l’île à respecter les procédures afin d’éviter l’introduction d’éventuels organismes nuisibles.

Nous réfléchissons également à la possibilité d’organiser des exercices de simulation d’incursions d’organismes nuisibles car ce type d’exercice est extrêmement bénéfique. Les simulations virtuelles sont intéressantes car elles sont pratiques et demandent peu de moyens, même si nous reconnaissons l’intérêt de reproduire la complexité d’une incursion en conditions réelles. La collaboration régionale me semble essentielle dans la lutte contre les organismes nuisibles d’apparition récente. Il s’agit d’une démarche gagnant-gagnant qui permet aux pays de partager leurs expériences et leurs stratégies.

Comment la CIPV peut-elle aider les Îles Cook et votre région à relever ces défis?

L’un des principaux défis à relever dans la région Pacifique Sud-Ouest est le renforcement des capacités. Nous sommes des petits États insulaires et ne disposons pas des ressources nécessaires pour élaborer notre propre matériel. C’est pourquoi les guides, les matériels de formation et les autres ressources de la CIPV sont essentiels pour améliorer les compétences de notre personnel et renforcer notre état de préparation. Aux îles Cook, nous avons fait du renforcement des capacités une priorité, et nous nous félicitons des dernières formations en ligne proposées sur le site de la CIPV, qui complètent les guides de la CIPV que nous utilisons déjà. Nous réfléchissons à de nouveaux moyens d’intégrer ce matériel dans nos programmes de formation nationaux, en adaptant notre approche du renforcement des capacités à notre contexte singulier de petit État insulaire. Nous attendons avec impatience la publication des ressources en cours d’élaboration, et le Secrétariat de la CIPV peut compter sur mon soutien pour promouvoir leur utilisation dans l’ensemble de la région!

Y a-t-il un message que vous souhaitez transmettre à la communauté internationale?

Oui. Bien que les îles Cook soient un petit pays, elles sont confrontées aux mêmes défis que les grands pays, à savoir la pénurie de terres, le vieillissement de la main-d’œuvre et la nécessité d’assurer la sécurité alimentaire. Malgré ces difficultés, nous faisons de notre mieux et nous nous efforçons de promouvoir la résilience et la durabilité. Nous voulons que le monde sache que nous souhaitons et pouvons contribuer aux efforts mondiaux. Nous accordons également une grande importance aux activités de soutien et de collaboration qui nous aident à relever les défis singuliers auxquels nous sommes confrontés. La santé des végétaux fait partie intégrante de la sécurité alimentaire et mérite autant d’attention de la part de la communauté internationale.

J’espère que la communauté internationale prendra conscience de l’interdépendance entre la santé des végétaux, la sécurité alimentaire et la durabilité environnementale. Sans agriculteurs, nous ne mangeons pas, c’est aussi simple que ça.

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