Posted on mar, 03 Sep 2024, 08:00
M. Osama El-Lissy quitte ses fonctions de Secrétaire de la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV), un organe de la FAO relevant de l’article XIV. Il nous a parlé de sa carrière, de son engagement en faveur de la santé des végétaux et de sa participation aux efforts mondiaux de protection des ressources végétales contre les organismes nuisibles.
Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre la CIPV?
Sa noble mission, à savoir protéger les végétaux, l’agriculture et les ressources naturelles contre les organismes nuisibles et favoriser l’innocuité du commerce.
En réfléchissant à cette mission et à la crise mondiale de la sécurité alimentaire, avec près de 800 millions de personnes qui souffrent de la faim dans le monde, il m’est apparu évident que je devais aider et contribuer à l’accomplissement d’une mission aussi noble. J’ai pensé que ma longue carrière et mon expérience dans le contrôle et l’éradication des organismes nuisibles pourraient contribuer à réduire leurs effets sur l’agriculture ainsi que sur le commerce des végétaux et des produits d’origine végétale.
Les organismes nuisibles aux végétaux détruisent chaque année 20 à 40 pour cent des récoltes, y compris les cultures vivrières. Réduire ces pertes pourrait accroître de manière significative la disponibilité des denrées alimentaires et contribuer ainsi à lutter contre l’insécurité alimentaire.
Quels sont les moments marquants de votre passage à la CIPV?
Si je considère ce qui m’a incité à rejoindre la CIPV, certaines de mes expériences les plus positives et les plus mémorables ont été celles où j’ai pu observer la façon dont les 185 parties contractantes à la CIPV ont réagi aux initiatives que nous avons proposées pour relever les défis phytosanitaires. Dans leur sagesse collective, la communauté de la CIPV et les parties contractantes ont pris acte des problèmes et ont bien compris les mesures à prendre. Ils ont donc réagi positivement à des initiatives telles que le programme phytosanitaire mondial et le déploiement de la solution ePhyto de la CIPV dans un plus grand nombre de pays.
Quel est, selon vous, le plus grand défi à relever aujourd’hui dans le domaine phytosanitaire au niveau mondial?
Le monde est vaste et diversifié, ce qui rend difficile la mise en œuvre uniforme des normes phytosanitaires. Mettre en place au niveau mondial les infrastructures phytosanitaires nécessaires à l’application des normes ou à l’accomplissement de la mission de la CIPV constitue un défi de taille.
Le point positif est que le monde est conscient de ce défi et est disposé à le relever. Il s’agit certes d’un problème de taille, mais le fait d’en être conscient laisse espérer qu’il pourra être réglé. Les pays ont des niveaux de capacité et d’infrastructure variables, et nous devons combler les lacunes existantes et améliorer les capacités pour remplir efficacement notre mission collective.
Que faut-il faire alors pour relever ce défi?
Pour comprendre les défis phytosanitaires et trouver des solutions potentielles, il faut mettre en œuvre concrètement l’ensemble des politiques, stratégies, buts et objectifs. Élaborer des stratégies et des objectifs ambitieux, comme l’éradication de la faim, est une chose, mais mettre en œuvre activement les mesures prévues dans la stratégie pour atteindre les objectifs en est une autre. La mise en œuvre de toute stratégie nécessite un plan opérationnel bien conçu et pratique.
Le programme phytosanitaire mondial, en commençant par le programme phytosanitaire africain (PPA), met l’accent sur la mise en œuvre. Grâce au PPA, la CIPV fait passer la mise en œuvre des normes phytosanitaires à un tout autre niveau. Le PPA rassemble tous les outils scientifiques nécessaires pour effectuer des prospections de façon dynamique et identifier correctement les organismes nuisibles de manière à les contenir, les supprimer ou les éradiquer. En substance, le PPA sert de mécanisme pour mettre en œuvre les politiques mondiales, les ODD, le Cadre stratégique avec les [quatre améliorations][5] et les stratégies phytosanitaires régionales.
Pour assurer l’efficacité et le succès des stratégies et des programmes, il est essentiel de réaliser un suivi systématique de la mise en œuvre des programmes et d’en mesurer les résultats. Par exemple, si l’on souhaite réduire les effets des organismes nuisibles, il faut pouvoir mesurer le niveau d’infestation par ces derniers et les pertes de rendement avant et après la mise en œuvre du programme. La mise en œuvre demeure le principal défi. Prendre en compte les différents niveaux de capacité à travers le monde peut contribuer de manière significative à la mise en œuvre d’initiatives aussi importantes.
Qu’est-ce qui vous manquera de votre travail?
Les gens me manqueront, c’est certain. On a beau avoir les meilleures stratégies et de vastes ressources, cela ne sert à rien si l’on ne dispose pas d’un personnel talentueux, expérimenté et dévoué.
Dans mon humble expérience de Secrétaire de la CIPV, j’ai été très ému par les collègues du Secrétariat. Tout le monde ici a envie de se retrousser les manches, de travailler et de faire de son mieux pour remplir sa mission. Voir tout cela m’a motivé pour en faire encore plus.
Une autre chose que j’admire est la réponse rapide et positive apportée par les parties contractantes lorsqu’on les sollicite pour obtenir leur soutien. Au cours de mes déplacements, les organisations nationales de la protection des végétaux ont déployé des efforts considérables pour organiser des réunions avec les responsables des ministères et des organismes compétents afin d’assurer la réussite de ces rencontres. Cela illustre le pouvoir remarquable de l’effort collectif, auquel je crois profondément.
Quels grands enseignements tirez-vous de l’ensemble de votre carrière?
Tout d’abord, il faut connaître son activité ou son métier. Que vous soyez comptable, entomologiste ou professionnel de la communication, vous devez être bien informé et au fait des évolutions et des pratiques dans votre domaine. Ensuite, il faut s’améliorer sans cesse en n’arrêtant jamais d’apprendre.
Deuxièmement, vous devez apprendre à connaître les gens. Il faut comprendre comment interagir avec les gens et leur répondre en tenant compte de leur style de communication et de leurs besoins propres. Cela inclut le respect, le soutien et le traitement équitable des personnes.
Enfin, le plus important est d’être aimable. L’amabilité ne consiste pas seulement à être sympathique. Il s’agit de se traiter soi-même et de traiter les autres avec compassion, même dans les situations difficiles.
J’ai essayé de suivre ces principes tout au long de ma carrière et je les trouve utiles.
Avez-vous des projets pour la suite?
Je vais rentrer chez moi, aux États-Unis d’Amérique, me reposer, réfléchir et décider du prochain chapitre de ma vie et de ma carrière. J’essaie de ne pas trop anticiper. Le monde regorge d’opportunités. Le tout est de saisir la bonne opportunité au bon moment.
Y a-t-il un message que vous souhaiteriez transmettre à la communauté de la CIPV et à la FAO?
Il n’y a qu’une seule CIPV et une seule FAO dans le monde. Lorsque nous réfléchissons à la mission de la FAO en tant qu’organisation technique des Nations Unies et à celle de la CIPV, nous devrions toujours nous inspirer de ces nobles missions. Nous devons continuellement nous demander quelles mesures il convient de prendre pour remplir efficacement ces missions.
Le monde attend de la FAO et de la CIPV qu’elles remplissent leurs missions. Pour atteindre leurs objectifs, elles doivent absolument évaluer et améliorer en permanence leurs systèmes et structures. Malgré les progrès considérables accomplis, les défis actuels exigent des efforts constants et le dévouement de l’ensemble des parties concernées pour garantir la réalisation de ces missions. Nous devons être prêts à prendre les mesures qui s’imposent.